19 Mai 1940

19 Mai 1940

À 4 h, six Hawker Hurricane Mk I décollent de Moorsele pour une patrouille du secteur Cambrai —Le Cateau-Cambrésis.

À 17 h 30, six appareils patrouillent au-dessus d’Arras, tandis que cinq autres surveillent la route entre Arras et Cambrai. Un affrontement éclate, vers 19 h 40, avec une quinzaine de Bf 109 de la 9./JG 26, au nord-est de Cambrai[1]. Selon le Flying Officer Anthony Eyre (L1289 KW-V) :

« Je suis le n° 2 d’une section de quatre, quand le n° 4 nous avertit par radio que des avions ennemis s’approchent. Je vire à 90 degrés par la droite, puis 180 degrés et attaque sur le côté droit un Bf.109 en train d’attaquer un appareil de notre formation à environ cent vingt mètres en dessous. Je vire à 90 degrés et cherche le reste des appareils. Je vois un avion, que je crois être celui que je viens d’engager en piqué dégageant une fumée noire. Puis je vois un autre Bf.109 en dessous. Je plonge sur lui et tire une longue rafale juste en dessous. Je dégage, munition pratiquement épuisée »[2].

Selon le Pilot Officer William L. McKnight :

« Lors d’une patrouille au-dessus de Cambrai, l’ennemi au nombre de sept attaques par derrière suivi par huit autres appareils. Après avoir alerté le reste de la section par radio, je prends très vite de l’altitude par un virage à gauche, suis une machine ennemie et tire. De la fumée sort de l’avion ennemi que je tire jusqu’au contact du sol »[3].

Dans le même temps, le Hawker Hurricane Mk I N2331 est touché dans le combat. Blessé aux jambes, le Flying Officer Richard D. Pexton est contraint de sauter en parachute en territoire adversaire. Il est difficilement évacué vers Dunkerque où il peut embarquer, le 23 mai, à bord du navire-hôpital Worthing. De retour en Angleterre, il est admis à l’hôpital de Barnet (Hertfordshire) et ne reviendra dans l’escadron qu’à la date du 10 juillet. Le Flying Officer Richard D. Pexton a fourni un compte rendu très détaillé sur ces quelques jours d’odyssée à travers la débâcle en France :

« Je suis abattu dans l’après-midi du 19 mai dans les environs de Cambrai. Après quelques moments difficiles, je me retrouve finalement entre les mains du Royal Army Medical Corps dans la soirée du 20 mai. Heureusement mes blessures sont légères, mais je suis toutefois incapable de marcher.

Je suis alors conduit, en ambulance, au sein d’une Casualty Clearing Station avant d’être évacué vers un train de la Croix rouge à Armentières (vers 21h30). Peu après, un autre pilote est amené, à bord d’une civière, dans le même wagon. Il s’agit du Pilot Officer Richard A. Sanders[4] qui souffre de brûlures sévères sur l’ensemble du corps. On nous sert un léger repas froid, puis toutes les lumières sont coupées et le train démarre une fois la nuit tombée.

Je me réveil le lendemain : le train est à l’arrêt et des bombes tombent dans les environs. On m’informe que la voie ferrée a été bombardée et que cinq autres trains sont devant nous. Le bombardement continue toute la journée et notre moral chute fortement.

Vers 17h00, plusieurs bombes tombent à proximité et, soudain, plusieurs avions mitraillent le train dans toute la longueur. Il y a plusieurs morts. Après une petite heure, plusieurs ambulances arrivent pour charger les différents blessés. Nos regards sont saisissants d’angoisse et bien peu d’entre nous espèrent encore s’échapper voir simplement survivre.

Nous sommes transportés à l’hôpital de Steenvoorde, dans la soirée du 21 mai, d’où je suis finalement envoyé vers Dunkerque le 23 mai. J’ai la chance de pouvoir embarquer à bord du Worthing afin de rejoindre l’Angleterre. Ces quelques jours m’ont permis de comprendre tous les dangers en cas de brulures et j’ai partagé mon expérience au sein du No.615 Squadron à mon retour. Désormais nous portons tous des vêtements de protections, quelle que soit la météo, tandis que nous consommons toujours notre réservoir de réserve en priorité afin de réduire les risques d’incendie dans le cockpit. »[5]

Selon Donald Caldwell[6], les pilotes britanniques auraient affronté la 4./JG 26 sous les ordres du Kommandeur, le Hautpman Herwig Knüppel (Bf.109 E-3 – W.Nr.1542). Ce dernier est abattu et tué durant le combat, tandis que l’Oberleutnant Karl Ebbighausen (Bf 109 E-3), blessé, effectue un atterrissage forcé dans les environs de Lille. Un autre Bf.109 E-3 est signalé comme ayant effectué un atterrissage forcé à Bruxelles. Peut-être s’agit-il de l’appareil qui aurait heurté, selon l’auteur, le Hurricane du Flying Officer Richard D. Pexton[7]. Selon un résumé des évènements côté allemand :

« Chasse libre sur la région de Grammont — Lille – Cambrai. Le groupe décolle à 19 h 7 sous le commandement du Hauptman Knüppel. Au-dessus de la Lille, un combat aérien a lieu avec quatre Hurricanes au cours duquel trois machines ennemies ont été abattues. Le capitaine Knüppel en combat singulier est mitraillé de front, puis pourchassé en descente. On n’a pas suivi la suite du combat. Le Hurricane a était abattu par le Leutnant Krug. Le Hauptman Knüppel n’est pas rentré de cette mission. »[8]

 

Une dernière sortie est signalée, dans la soirée, au-dessus d’Audenarde — Tournai, sans évènements particuliers. Mais, c’est la fin pour le No.615 Squadron comme l’explique le Squadron Leader Joseph R. Kayll :

« Dans la soirée du 19 mai, nous sommes surpris de voir une moto et un side-car allemand à proximité de l’aérodrome de Moorsele, tandis que nous entendons des tirs à l’est. Puis, nous recevons l’ordre de rejoindre Merville dès l’aube, en ne laissant que le minimum de personnel au sol. Durant la nuit (vers 22 h), un officier belge arrive et une explique avoir reçu l’ordre de saboter l’aérodrome immédiatement. Il me faut environ une heure pour le persuader de renoncer grâce à l’aide de quelques verres. Un compromis est finalement obtenu selon lequel nous devons l’aider à placer les mines et endommager la piste, sauf un petit chemin afin de pouvoir décoller le lendemain ».[9]

Toujours est-il que les Pilot Officer Robert D. Grassick[10], William L. McKnight[11] et Percival S. Turner[12] reçoivent l’ordre, dans la soirée, de rejoindre l’aérodrome de Kenley pour réintégrer le No.242 (RAF) Squadron.

[1] CULL, Brian ; LANDER, Bruce ; WEISS, Heinrich. Twelve Days in May. The Air Battle for Northern France and the Low Countires, 10 – 21 May 1940, as seen through the eyes of the fighter pilots involved. London : Grub Street, 1999, p.261.

[2] Combat Reports. Flying Officer Anthony Eyre (19/05/40). Kew : The National Archives, AIR 50/175/2. GILLET, Arnaud. La Luftwaffe à l’ouest – Les victoires de l’aviation de chasse britannique (10 mai 1940 – 23 mai 1940). Béthenville : Arnaud Gillet, 2008, p.296.

[3] Combat Reports. Pilot Officer William L. McKnight (19/05/40). Kew : The National Archives, AIR 50/175/22. GILLET, Arnaud. La Luftwaffe à l’ouest – Les victoires de l’aviation de chasse britannique (10 mai 1940 – 23 mai 1940). Béthenville : Arnaud Gillet, 2008, p.296.

[4] Le Pilot Officer Richard Atheling Sanders est détaché, depuis le No.141 (RAF) Squadron, auprès du No.87 (RAF) Squadron à la date du 16 mai 1940. Il est abattu, à bord du Hawker Hurricane Mk I N2710, le 20 mai probablement victime d’un Bf 110 au nord-ouest d’Arras.

[5] Casualty Record : Flying Officer Richard D. Pexton The National Archives, Kew : AIR 81/742.

[6] CALDWELL Donald. The JG 26 War Diarry, Vol 1 (1939 – 1942). Grub Street, 1996, p.28 à 29.

[7] A noter que Peter D. Cornwell fait correspondre la perte du Flying Officer Richard D. Pexton à une revendication du Hauptman Günther Lützow (Stab I./JG 3), vers 19h15, dans les environs de Arras – Cambrai.

[8] GILLET, Arnaud. La Luftwaffe à l’ouest – Les victoires de l’aviation de chasse britannique (10 mai 1940 – 23 mai 1940). Béthenville : Arnaud Gillet, 2008, p.296.

[9] CULL, Brian ; LANDER, Bruce ; WEISS, Heinrich. Twelve Days in May. The Air Battle for Northern France and the Low Countires, 10 – 21 May 1940, as seen through the eyes of the fighter pilots involved. London : Grub Street, 1999, p.261 à 262.

[10] De retour au No.242 (RAF) Squadron, il participe aux divers combats au-dessus de Dunkerque et à la Bataille d’Angleterre, ainsi qu’aux divers opérations britanniques de 1941. Il rejoint, le 28 septembre 1941, la OTU d’Aden. Désormais la suite de sa carrière se déroulera essentiellement en Afrique orientale et australe comme instructeur et pilote de liaison – transport. Il intègre la RCAF, le 1er mai 1945 et rentre au Canada. Il décède le 28 octobre 1978.

[11] De retour au No.242 (RAF) Squadron, il participe aux divers combats au-dessus de Dunkerque et en appuis aux dernières troupes britanniques jusqu’à la mi-juin 1940, puis à la Bataille d’Angleterre. Le 12 janvier 1941, il disparaît en combat aérien, aux commandes du Hawker Hurricane Mk I P2961, lors d’une Rhubarb dans les environs de Gravelines. Son nom est commémoré au Runnymede Memorial.

[12] De retour au No.242 (RAF) Squadron, il participe aux divers combats au-dessus de Dunkerque et à la Bataille d’Angleterre. Il rejoint le No.145 (RAF) Squadron, en juin 1941, et obtient la DFC en octobre de la même année. Après un court repos, il prend le commandement du No.411 (RCAF) Squadron, en décembre 1941, puis du No.249 (RAF) Squadron à Malte, en février 1942. Il reste sur l’île assiégée jusqu’en novembre 1943 en exerçant diverses fonctions. En mai 1944, il reçoit la DSO, tout en intégrant le QG de la Desert Air Force. Il revient en Europe, en janvier 1945, avec le grade de Group Captain pour prendre le commandement du No.127 (RAF) Wing. Il intègre la RCAF après la guerre jusqu’à sa retraite en 1965. Il décède le 23 juillet 1985.

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