16 Mai 1940
Après les pilotes du No.229 (RAF) Squadron, un second groupe de renfort arrive avec un détachement de trois pilotes en provenance du No.242 (RAF) Squadron, B Flight. Il s’agit en l’occurrence, des Pilot Officer Robert D. Grassick[1], William L. McKnight[2] et Percival S. Turner[3]. Ils disposent déjà d’une petite expérience puisqu’ils ont rejoint le No.607 (RAF) Squadron, le 14 mai, et participés à quelques opérations, lesquelles ont déjà couté la vie de Flight Lieutnant John L. Sullivan en charge du détachement.
Le No.615 Squadron quitte Vitry-en-Artois et Abbeville pour Moorsele avec douze Hawker Hurricane Mk I. C’est durant ce transfert que le Pilot Officer Robert D. Grassick (KW-X) commet une malencontreuse erreur lorsqu’il engage et revendique un possible bombardier Junkers Ju.88. Celui-ci s’avère être un Bristol Blenheim Mk IV (N6168 TR-A) du No.59 (RAF) Squadron rentrant d’une mission de reconnaissance. Le Flight Lieutnant G.V. Smither réussit, néanmoins, à poser son appareil gravement endommagé sur la piste de Vitry-en-Artois avec son mitrailleur blessé (Aircraftman Davy J. Pitcher)[4].
Dans l’après-midi, neuf Hawker Hurricane Mk I décollent sous les ordres du Flight Lieutnant Leslie T.W. Thornley afin d’escorter un Westland Lysander. Entre Tirlemont et Bruxelles, les pilotes britanniques sont surpris par plusieurs Bf.109. Le Flight Lieutnant Leslie T.W. Thornley (N2335) est immédiatement abattu, dans les environs de Rosières, et tué. Selon le Pilot Officer Thomas C. Jackson (N2338) :
« J’ouvre la verrière, car je n’arrive pas à voir grand-chose à l’arrière. Quasiment au même moment, alors que nous volons avec le soleil derrière, nous avons été pris par surprise. Je ne m’en suis rendu compte qu’après avoir été touché une première fois. Un appareil passe sous moi et j’essaye de le poursuivre, mais mon moteur coupe. Un second Bf.109 et j’ai ma chance – je crois voir quelques débris. Je continue à tirer dessus par-derrière. Plein d’avions dans le ciel. Mon appareil est, alors, gravement touché et soudain une explosion. J’ai mes lunettes, mes bottes, mais plus mon casque. Je ne débranche pas l’arrivée d’air, etc., mais je bondis tout simplement en dehors. J’ouvre le parachute et ne peux m’empêcher de songer : « dieu que c’est calme ».
Il est capturé dès son arrivée au sol par des soldats allemands. Blessé et souffrant de plusieurs brûlures, il se souvient :
« Un soldat sort un couteau et ouvre mon col, tandis qu’un autre sort une seringue pour m’injecter un calmant. Un véhicule arrive et on m’ordonne de grimper dedans ; un Oberleutnant s’assit à l’arrière en me braquant son pistolet. Je suis conduit à un hôpital de campagne à Tirlemont où je partage pendant deux jours une chambre avec huit ou neuf officiers allemands ; l’un d’eux gravement blessé à l’estomac étant très bruyant. Peu après, je suis transféré dans un grand bâtiment avec un sol en pierre où sont concentrés plusieurs centaines de soldats britanniques, avant d’être conduit, une semaine après, vers Maastricht ».
Un troisième pilote est perdu, en l’occurrence, le Pilot Officer Brian P. Young dont le Hawker Hurricane Mk I (P2577) s’écrase en flammes près d’Essene. Brûlé dans le haut du corps et au visage, il parvient cependant à sauter. Il est, toutefois, malchanceux puisqu’il est immédiatement pris pour cible par des soldats britanniques qui ouvre le feu dans sa direction, puis lance une grenade, avant de s’apercevoir qu’il s’agit de l’un d’entre eux. Il est conduit vers un hôpital de campagne à Dieppe avant d’être évacué vers Saint Nazaire. N’ayant décidément pas de chance, son ambulance est touchée, en arrivant dans le port, par un éclat d’obus tuant la quasi-totalité des occupants. Brian P. Young en réchappe miraculeusement afin d’être embarqué dans un navire à destination de l’Angleterre. Il ne reviendra plus au No.615 Squadron. Après une longue hospitalisation, il reprend du service courant 1942 comme pilote d’hydravion Short S.25 Sunderland au sein du Coastal Command, avant d’être transféré au Moyen-Orient dans divers commandements. Il reste dans la RAF après la guerre en exerçant toute une série de hauts postes, tout en suivant les cours de l’Imperial Defense College. Il prend sa retraite le 5 mai 1973 avec le grade de Air Vice-Marshal et décède le 26 juillet 1992[5].
De son côté, le Pilot Officer Robert D. Grassick (KW-X), très actif en cette journée, est en mesure de revendiquer un chasseur allemand abattu.
Il est difficile de pouvoir identifier l’affrontement en question faute de disposer de l’heure durant laquelle cette escorte a eu lieu. Ainsi, Brian Cull[6] et Donald Caldwell[7] font mention d’un affrontement vers 15h50 avec le II./JG 26, lesquelles revendiquent trois victoires (identifiés comme des Morane 406 et Hawk 75A) malgré la perte d’un appareil (pilote tué). Cette analyse est, toutefois, démentie par Arnaud Gillet[8] et Peter D. Cornwell[9] qui y font un lien avec les événements propres au No.87 (RAF) Squadron. Une autre hypothèse serait celle du I./JG 27 qui revendiquent plusieurs Hawker Hurricane dans les environs de Bruxelles vers 13h40 (malheureusement une partie de ces revendications ne disposent pas d’heure précise). Ainsi, le Flight Lieutnant Leslie T.W. Thornley serait tombé victime de l’Oberleutnant Gerhart Framm de la 2./JG 27. Inversement, deux Bf.109 E-3 de la I./JG 27 aurait été endommagé, dont celui du Feldwebel Otto Sawallish. Une fois de plus, faute de davantage de précisions, il reste délicat de faire correspondre les faits, sans compter que rien ne prouve que l’ensemble des événements propres au No.615 Squadron ait lieu lors de la même sortie.
Le Flight Lieutnant Leslie T.W. Thornley avait 26 ans. Son corps aurait été retrouvé et enterré par des hommes du Lancashire Fuesiliers dans les environs de Rosières (Belgique). Sa tombe semble avoir été perdue et son nom est aujourd’hui commémoré au Runnymede Memorial.
[1] Robert Davidson Grassick (41579) est né à Londres (Ontario – Canada) le 22 mai 1917, et rejoint la RAF avec une SSC en novembre 1938. Après sa formation à la No.5 (RAF) Flying Training School de Sealand, il est transféré au No.3 (RAF) Squadron (septembre 1939) puis No.242 (RAF) Squadron (novembre 1939). Il est détaché en urgence auprès du No.607 (RAF) Squadron, le 14 mai 1940, avec trois autres pilotes du B Flight de son escadron. SHORES Christopher ; WILLIAMS Clive. Aces High: A Tribute to the Most Notable Fighter Pilots of the British and Commonwealth Forces of WWII. 2008, Grub Street ; Battle of Britain London Monument, The Airmen’s Stories – F/O R D Grassick: http://www.bbm.org.uk/airmen/Grassick.htm
[2] William Lidstone McKnight (41937) est né à Edmonton (Alberta – Canada) le 18 novembre 1918. Il rejoint la RAF, en février 1939, avec une SSU. Après sa formation, auprès de la No.6 (RAF) FTS de Little Rissington il intègre le No.242 (RAF) Squadron le 6 novembre 1939, avant d’être détaché auprès du No.607 (RAF) Squadron le 14 mai 1940. Battle of Britain London Monument, The Airmen’s Stories – P/O W L McKnight: http://www.bbm.org.uk/airmen/McKnight.htm ; SHORES Christopher ; WILLIAMS Clive. Aces High: A Tribute to the Most Notable Fighter Pilots of the British and Commonwealth Forces of WWII. 2008, Grub Street, p.437.
[3] Percival Stanley Turner (41631) est né le 3 septembre 1913 à Ivybridge (Devon – Angleterre). Sa famille émigre, cependant, à Toronto au Canada où il effectue des études d’ingénieur, tout en intégrant le No.110 Squadron de la Canadian Auxiliary Air Force. Il rejoint la RAF, avec une SSC, novembre 1938. Après sa formation auprès de la No.7 (RAF) FTS de Peterborought et la No.1 (RAF) Fighter Training School de St.Athan, il intègre le No.219 (RAF) Squadron, le 4 octobre 1939, avant d’être transféré au No.242 (RAF) Squadron le 20 novembre 1939. Il est envoyé, en France, en détachement au No.607 (RAF) Squadron le 14 mai 1940. Battle of Britain London Monument, The Airmen’s Stories – F/Lt. P S Turner : http://www.bbm.org.uk/airmen/TurnerPS.htm
[4] CULL, Brian ; LANDER, Bruce ; WEISS, Heinrich. Twelve Days in May. The Air Battle for Northern France and the Low Countires, 10 – 21 May 1940, as seen through the eyes of the fighter pilots involved. London : Grub Street, 1999. p.166.
[5] Air of Authority – A History of RAF Organisation – Air Vice-Marshal B P Young (33376) : http://www.rafweb.org/Biographies/Young_BP.htm
[6] CULL, Brian ; LANDER, Bruce ; WEISS, Heinrich. Twelve Days in May. The Air Battle for Northern France and the Low Countires, 10 – 21 May 1940, as seen through the eyes of the fighter pilots involved. London : Grub Street, 1999. p.166 à 168.
[7] CALDWELL Donald. The JG 26 War Diarry, Vol 1 (1939 – 1942). Grub Street, 1996. 346 p.
[8] GILLET, Arnaud. La Luftwaffe à l’ouest – Les victoires de l’aviation de chasse britannique (10 mai 1940 – 23 mai 1940). Béthenville : Arnaud Gillet, 2008. p.221 et 222.
[9] CORNWELL, Peter D. The Battle of France, Then and Now : Six Nations Locked in Aerial Combat, September 1939 to June 1940. Old Harlow : After the Battle, 2007. p. 294 et 299